Visages des femmes du monde et défis contemporains (5/7)

, par Claire

L’Asie

L’éducation des filles permet l’émancipation des femmes. « Ouvrez une école, et vous fermerez une prison » dit le poète. Et c’est peut être le défi majeur en Asie, celui de l’accès à l’école. L’éducation fait partie des OMD : cela étant, l’objectif de l’Education pour Tous n’est toujours pas atteint, et les petites filles en sont les premières touchées. Placer des personnes dans un obscurantisme intellectuel les place de fait dans une vulnérabilité certaine et un état de dépendance. Ce sera à l’action syndicale de relayer cette obligation dans les instances internationales, et à favoriser la coopération avec les acteurs de société civile sur le terrain.

Mais en Asie peut-être plus qu’ailleurs, il est aussi question du travail « informel », c’est à dire le travail dissimulé, qui place dans un état de vulnérabilité les travailleurs et travailleuses qu’il prend en otage loin du respect des droits élémentaires du travail. Dépourvues de la couverture juridique des conventions collectives, du Code du travail ou des normes internationales, ces femmes sont particulièrement présentes dans l’immense secteur du travail domestique. Il n’est pas rare que cet état de fait soit aggravé d’une immigration légale ou non, qui écrase les droits des femmes.

Par exemple, beaucoup de femmes des Philippines migrent vers les pays du Moyen-Orient pour y trouver un travail en tant qu’employée de maison. Migrantes, ne maîtrisant ni la culture ni la langue du pays où elles arrivent, pratiquant leur activité de façon informelle, non déclarée et exempte de droits, elles sont à la merci de leur employeur. Le media électronique « Equal times » rapportait cette année le cas d’une jeune fille de 14 ans ayant émigré en Jordanie pour y trouver du travail, sévèrement battue par son employeur et n’ayant perçu que trois maigres mois de salaire pour plus d’un an de travail !

Ce problème du travail sous-terrain est connu, et là encore universel. Déconnectées de l’accès à un syndicat, ces femmes doivent faire l’objet de notre attention. L’OIT a très opportunément adopté en 2011 la convention 189 sur le travail domestique, complétée par la recommandation n°202 sur les socles de protection sociale, afin de garantir les droits de ces travailleuses, et lutter contre l’informalité.

L’action syndicale, coordonnée par la CSI, sera indispensable et essentielle sur ce terrain, que ce soit par la pression sur les gouvernements pour qu’ils ratifient ce nouvel instrument, comme par l’action sur le terrain – formation, syndicalisation, fédération des énergies revendicatives.

L’action syndicale pour les femmes en Asie prend aussi les traits de la lutte contre le travail forcé, et dans son prolongement inévitable, le travail des enfants. Vous voyez bien ici que travail des filles ne diffère pas du travail des garçons. La spécificité du combat pour les femmes ne peut pas nous faire oublier cette unité des droits de l’humain. En Ouzbékistan, les champs de coton sont le terrain de production de coton pour des multinationales occidentales. Les frontières de l’Union européenne ou des Etats-Unis dépassées, qu’il est convenant de franchir le Rubicon des droits sociaux ! La convention 182 de l’OIT sur le travail des enfants, est une convention fondamentale et dont l’applicabilité universelle nous permet de l’utiliser là bas comme ici. Les discours de certaines entreprises arguant de « la culture du travail des enfants » est proprement intolérable. Le déguisement de profits financiers sous des atours de respect des cultures ne doit pas nous dévoyer : la tolérance de l’autre s’arrête où commence l’atteinte à l’intégrité physique et morale des personnes.

La solidarité internationale est presque un cliché. Elle est pourtant inévitable, et nécessaire en ces périodes difficiles, et surtout dans un combat qui en appelle à l’unité des forces syndicales – puisque pour les femmes du monde, si les différences culturelles doivent être comprises, elles ne peuvent désunir. Bien au contraire.

L’importance de la solidarité internationale a été démontrée emblématiquement en 2012 par le combat de toute une vie d’une femme birmane, Aung San Suu Kyi, placée sous résidence surveillée et interdite d’en sortir pendant plusieurs années. Son intervention lors de la dernière conférence internationale du Travail en 2012 était symbolique... L’action de l’OIT, seul organe tripartite au monde défendant les droits humains fondamentaux et les droits du travail, sera l’amphithéâtre actif de cette solidarité mondiale pour un travail viable, décent, protecteur.

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