La lutte contre les violences sexistes et sexuelles au travail

, par Gabriel THOISON

Principe républicain, l’égalité a pour objet d’organiser une société pour que chacun.e ait les mêmes droits, c’est-à-dire des droits égaux quelles que soient les différences. Il implique de combattre toutes les formes de dominations, notamment celles qui relèvent du statut et du sexe.

Dans l’entreprise, ces deux formes de domination peuvent être cumulatives. Lorsque c’est le cas, les salariées sont majoritairement concernées et sont trop souvent, dans le cadre de leur travail, susceptibles d’être confrontées à des attitudes ou décisions sexistes, au harcèlement sexuel, voire à des agressions sexuelles.

Ces violences sexistes et sexuelles peuvent porter gravement atteinte à la santé physique et mentale. Plus fondamentalement, il s’agit d’une atteinte à la dignité et à l’intégrité physique sans lesquelles il ne peut y avoir d’égalité.

Pour que l’égalité professionnelle aboutisse, le combat syndical de Force Ouvrière doit prendre la place qui lui revient dans la lutte contre ces violences.

QUE PEUT FAIRE FORCE OUVRIÈRE ?

Prévenir et informer

Le syndicat peut libérer la parole dans le cadre de ses échanges avec les salarié.e.s tout en veillant à ne pas prendre de posture de jugement.

Dans les entreprises d’au moins 50 salarié.e.s, les IRP peuvent proposer des actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes.

Dans le cadre de la négociation, le syndicat peut négocier des accords allant plus loin que la loi en matière de harcèlement et de violence au travail mais aussi intégrer la question des violences sexistes et sexuelles dans le cadre d’une négociation sur l’égalité.

Agir

Les IRP peuvent mettre en œuvre le droit d’alerte pour atteinte aux droits des personnes et/ou pour danger grave et imminent. L’employeur sera tenu de mener une enquête et de faire cesser les violences sexistes et sexuelles si elles sont avérées.

Dans le cadre du droit d’alerte pour atteinte aux droits des personnes : en cas de désaccord avec l’employeur, les élus peuvent saisir le conseil de prud’hommes, qui statue en urgence en la forme des référés.

Dans le cadre du droit d’alerte pour danger grave et imminent : en cas de désaccord, les IRP se réunissent dans un délai n’excédant pas 24 heures. Si le désaccord persiste, l’inspecteur du travail est saisi.

Le syndicat peut soutenir le/la salarié.e victime et intervenir auprès de l’employeur pour faire cesser les violences.

Il peut également l’aider à constituer un dossier pour agir ensuite en justice.

En matière de harcèlement sexuel ou d’agissement sexiste discriminant, le syndicat peut utiliser l’action de substitution, c’est-à-dire qu’il peut agir en justice sans mandat express du/de la salarié.e. Il est seulement tenu d’informer l’intéressé.e. Sans objection de sa part, il poursuit l’action.

CONNAÎTRE POUR AGIR « QUI NE DIT MOT NE CONSENT PAS ! »

Les violences sexistes et sexuelles dans le cadre du travail peuvent prendre plusieurs formes :

Agissement sexiste

Tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. Critiquer une femme parce qu’elle n’est pas « féminine », ou un homme parce qu’il n’est pas « viril » peut caractériser l’agissement sexiste.

Harcèlement sexuel au travail

Soit des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à la dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent une situation intimidante, hostile ou offensante ; Afficher quotidiennement des photos à caractère sexuel dans le bureau peut relever du harcèlement sexuel. Soit toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. L’assurance d’un licenciement évité en contrepartie d’une relation sexuelle constitue un cas de harcèlement sexuel.

Agression sexuelle

Acte à caractère sexuel commis sur la personne d’autrui, par violence, contrainte, menace ou surprise. Il peut s’agir par exemple de caresses ou d’attouchements de nature sexuelle.

SUR CES SUJETS TOLÉRANCE « ZÉRO »

LA PARTICULARITÉ DES VIOLENCES SEXISTES ET SEXUELLES DANS L’ENTREPRISE

Les victimes ou témoins peuvent se poser la question de l’impact de la libération de la parole sur leur emploi, stage, formation. Plus leur situation économique sera difficile plus l’action le sera aussi.

Qui peut être victime ?

Tout.e.s salarié.e.s, personnes en formation, en stage ou candidat.e.s à un emploi, stage, formation, quel que soit le sexe, l’apparence, l’âge, l’orientation sexuelle, etc...

Quels peuvent être les auteurs de violences ?

Le ou la supérieur.e hiérarchique, le ou la collègue de travail, un.e client.e, un.e fournisseur.euse, etc...

Quelles sont les obligations de l’employeur ?

L’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale, notamment : prévention, information, formation, sanctions.

Quels sont les droits des salarié.e.s ?

Droit à la santé et à la sécurité. En cas de motif raisonnable de penser que la situation de travail présente un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé, les salarié.e.s disposent d’un droit d’alerte et de retrait.

Est interdite toute sanction pour avoir subi ou refusé de subir ou encore témoigné de faits de harcèlement sexuel ou pour les avoir relatés. Est interdite toute sanction, retenue de salaire, à l’encontre du/de la salarié.e ou du groupe de salarié.e.s qui a exercé son droit de retrait de manière légitime.

COMMENT FAIRE RESPECTER SES DROITS ?

En interne, saisir le syndicat FO dans l’entreprise et/ou les institutions représentatives du personnel (IRP). En externe, saisir l’inspecteur du travail, le médecin du travail, le défenseur des droits, prendre contact avec des organisations spécialisées.

Quels recours ?

Le recours pénal (art. 222-23, 27 et 33 du Code Pénal)

La personne faisant l’objet d’une agression sexuelle, ou d’un harcèlement sexuel, peut déposer plainte auprès du procureur de la République, du commissariat de police de la gendarmerie.

En cas d’agression ou de harcèlement sexuel, le tribunal correctionnel est compétent. En cas de viol, c’est la cour d’assises.

Pour l’agression sexuelle, les sanctions peuvent aller jusqu’à 5 ans de prison et 75 000 euros d’amendes. Pour le harcèlement sexuel, les sanctions peuvent aller jusqu’à 2 ans de prison et 30 000 euros d’amendes. Prescription : 6 ans. Pour le viol, les sanctions peuvent aller jusqu’à 15 ans de prison. Prescription : 20 ans.

Le recours civil (art. L.1134-1, L.1154-1 et L. 1471-1 du Code du travail)

Les salarié.e.s victimes peuvent saisir le juge des prud’hommes pour obtenir la réparation du préjudice subi au titre du non-respect par son employeur, de son obligation de santé et de sécurité et ce, quelle que soit la personne ayant commis ces agissements (collègue, fournisseur, client). Prescription : 2 ans.

Les victimes de harcèlement sexuel ou d’agissement sexiste au travail peuvent saisir le conseil des prud’hommes pour faire annuler toute mesure ou décision discriminatoire et obtenir réparation. Prescription : 5 ans.

QUELQUES CHIFFRES

1 femme sur 5 se dit victime de harcèlement sexuel dans sa vie professionnelle.

30 % des victimes de harcèlement sexuel n’en parlent à personne, moins d’un quart le signale à son employeur et 5 % des cas sont portés devant la justice.

23 % des femmes et 12 % des hommes ont déjà reçu des propositions sexuelles insistantes de la part d’un.e collègue, d’un.e client.e, d’un.e supérieur.e hiérarchique.

82 % des femmes ont déjà fait l’objet d’agissements sexistes ou sexuels au travail.

15 % des salariées victimes de harcèlement sexuels déclarent, à terme, avoir perdu leur emploi, soit parce qu’on les a licenciées ou forcées à la démission, soit parce qu’elles sont parties.

15 % des femmes et 9 % des hommes ont eu affaire à un.e client.e, un.e collègue, un.e supérieur.e hiérarchique ayant déjà touché ou essayé de toucher certaines parties de leur corps contre leur gré.

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